Jeunes et emploi : le grand décalage entre aspirations, formations… et réalité du marché

Jeunes et emploi : le grand décalage entre aspirations, formations… et réalité du marché
Ils veulent du sens, de meilleures conditions de travail, parfois un retour à l’essentiel. Selon la dernière enquête du Céreq publiée en mars 2025, plus d’un tiers des jeunes sortis du système scolaire en 2017 envisagent une réorientation professionnelle. Ce chiffre, impressionnant, dit beaucoup sur le décalage structurel entre les trajectoires de formation, les aspirations profondes des jeunes actifs… et les besoins du marché du travail.
Alors que la société peine encore à penser les transitions professionnelles autrement que sous l’angle de la réparation ou de l’échec, ces réorientations précoces traduisent peut-être une volonté de reprendre la main sur son avenir professionnel. Mais à quel prix ?
1. Un besoin croissant de changement
Selon cette même étude (Céreq,mars 2025), les jeunes concernés par une réorientation le font d’abord par choix :
- 93 % souhaitent changer de métier,
- 83 % évoluer vers un autre secteur,
- 50 % changer de statut (salariat ↔ indépendant),
- 30 % souhaitent déménager.
Le moteur principal reste l’attirance pour un nouveau métier (84 %), suivie de près par la quête de sens (77 %), de meilleures conditions de travail (67 %) et une meilleure rémunération (58 %).
Mais cette quête d’alignement personnel et professionnel révèle un malaise plus global : un sentiment d’avoir été orienté vers une voie qui ne correspond pas à la réalité de terrain, ou à ses propres aspirations.
2. Une insertion toujours marquée par les inégalités
Si la France affiche un taux de chômage des jeunes en baisse (19 % au 1er trimestre 2025 contre 21 % cinq ans plus tôt, source INSEE), cette moyenne cache des réalités très contrastées selon :
- Le niveau de diplôme : les non-diplômés restent les plus exposés,
- Le territoire : les zones rurales et certains quartiers urbains cumulent les freins,
- Le secteur : hôtellerie-restauration, commerce et services restent les secteurs les plus touchés par le turn-over et le déclassement.
👉 Le paradoxe : Des secteurs en tension… mais des jeunes qui ne veulent pas ou plus y travailler.
3. Des politiques publiques qui tentent de suivre
Face à ce besoin de réorientation dès les premières années de vie active, plusieurs dispositifs existent mais restent parfois peu lisibles, insuffisamment articulés ou peu adaptés aux réalités des jeunes.
- Le Compte Personnel de Formation (CPF) : utilisé par 25 % des jeunes en reconversion dans l’étude Céreq.
- CEP (Conseil en Évolution Professionnelle) : sollicité par 15 %, pourtant essentiel pour cadrer les transitions.
- Les Missions Locales : un acteur clé pour les jeunes en difficulté, mais parfois sous-dotées au regard de la complexité des accompagnements à mener.
- L’apprentissage : très efficace pour l’insertion (près de 70 % des apprentis trouvent un emploi durable), mais encore inégalement déployé selon les secteurs et les territoires.
- Transitions Pro : peu connu des jeunes actifs, bien qu’il permette des reconversions ambitieuses, notamment via le PTP (Projet de transition professionnelle).
4. Mieux accompagner, mieux évaluer : un impératif pour agir
Ce que montre le Céreq, c’est aussi la fragilité de ces parcours :
- 60 % des jeunes en reconversion sont passés par une période de chômage,
- 18 % seulement, estiment que leur démarche a réellement abouti,
- 23 % ont suspendu ou abandonné leur projet.
👉 D’où l’importance de renforcer l’accompagnement de proximité et de mieux mesurer l’impact des dispositifs mobilisés.
Chez Qualitest, nous menons régulièrement des études d’impact et de satisfaction pour évaluer l’efficacité des dispositifs d’accompagnement (CEP, CPF, PTP…), des structures (Missions Locales, opérateurs de formation) et des politiques locales d’insertion.
💡 Mesurer l’impact, c’est identifier les freins, les décrochages, mais aussi ce qui fonctionne vraiment… pour ajuster les parcours et sécuriser les transitions.
En conclusion
Le décalage entre formations, aspirations et débouchés n’est pas qu’un problème d’orientation initiale : c’est une question de souplesse du système, de lisibilité des parcours, et de capacité à accompagner durablement les jeunes dans leurs "bifurcations" professionnelles.
Crédit photo : Photo Pexels auteur : Alena Darmel